mardi 3 novembre 2009

Conseil national de l'Ethique : le foutage de gueule continue


Après la polémique Gourcuff-Kombouaré, voilà que le Conseil national de l'Ethique se saisit des propos de Louis Nicollin envers Benoît Pedretti. Ou comment une instance aux objectifs incertains est en train de se transformer en simple police de la parole, passant à côté d'une vraie mission de respect de l'éthique...

Louis Nicollin peut trembler : le Conseil national de l’Ethique, qui ne savait sans doute pas quoi faire de son lundi, a décidé de s’autosaisir de ses propos d’après-match. Au cas où vous auriez passé le week-end sur Mars, rappelons que le président de Montpellier avait traité le milieu et capitaine d’Auxerre, Benoît Pedretti, de « petite tarlouze », avant de promettre de « s’occuper » du cas de l’ex-international à l’occasion du match retour. Pas très classe (tout comme l’attitude truqueuse de Pedretti, digne d’un Fernando D’Amico ou d’un Jerko Leko, durant la rencontre), certes. Mais avec « Loulou » Nicollin, on a l’habitude de ces rodomontades gratinées. Et puis, les deux protagonistes de cette passe d’arme au micro de Canal+ s’étaient parlé et expliqué comme des grands garçons le lendemain, par téléphone et sans avocats. L’incident était clos ?

Hé bien non ! Car le CNE a donc décidé de fourrer son nez dans cette affaire, offrant là une nouvelle preuve de son inanité. Et ce n’est pas la première fois. Je m’explique. A sa création en 2002, cette instance avait un rôle purement consultatif et ne servait déjà pas à grand-chose, si ce n’est à permettre à la FFF de se donner bonne conscience à bon compte. Les choses se sont sensiblement gâtées à partir de 2005, quand la Fédé octroya un pouvoir disciplinaire au CNE, désormais susceptible de s’autosaisir de tous cas de « manquements à l'éthique commis par des licenciés à l'occasion de déclarations, attitudes ou comportements publics de nature à nuire à l'image du football. »

On le voit, ces attributions ne sont pas délimitées avec précision. Elles recèlent le risque de confondre une cause noble (le respect de la bonne image du sport) avec un flicage détestable, transformant les membres du CNE en petits gendarmes du politiquement correct. Comme si les atteintes à la bonne image du sport ne venaient que des déclarations d'avant et d'après-match... Il n’est d’ailleurs pas innocent que, de la réaction imagée de Louis Nicollin, les réactions se soient focalisées sur l’insulte, jusqu’à passer sous silence la seconde partie, celle qui comportait une menace à l’encontre du joueur. Cette dernière me semble bien davantage contraire à l’ « éthique » que la première, qu’en pensez-vous ? Et pourtant, on ne parle que du vocable prétendument homophobe lâchée par l’homme de la Paillade, révélateur, non ?

Mais qui sont au juste les membres du CNE ? Si leur président, Dominique Rocheteau, est une célébrité qu’il n’est pas utile de présenter, ses autres membres sont tous issus des différentes « familles » du football (FFF, LFP, amateurs). Et tout cela sans l’ombre d’un juriste ! De quoi décrédibiliser des décisions censées sanctionner d’éventuels manquements à l’éthique. On comprend mieux pourquoi les saisines du conseil sont à géométrie variable, que des phases d’activité intense (souvenons-nous de 2006 et de l’affaire de la CFA2 marseillaise disputant le « clasico » au Parc, dans laquelle le CNE fut désavoué après avoir infligé un point de pénalité aux deux équipes) succèdent à des périodes de léthargie.

La meilleure réponse à l'inanité du CNE a été récemment apportée par Christian Gourcuff : condamné à effectuer une « action pédagogique » pour avoir usé de sa libre parole à l’encontre de Claude Makelele, l’entraîneur de Lorient a refusé de se plier à la décision du conseil, préférant purger sa suspension, arguant à juste titre du fait qu’il n’avait pas attendu le CNE pour se comporter en éducateur. Que la police de la parole ouvre son dictionnaire et regarde le sens du mot éthique, elle verra qu’il désigne les principes guidant le comportement de chacun envers autrui, et non le simple contrôle du vocabulaire. Au hasard, la présence de dirigeants dans les vestiaires des arbitres ou les gestes violents sur le terrain, comme le tacle du Nancéen Lotiès à Boulogne samedi, mériteraient, davantage que quelques paroles trop hautes, un rappel à l'ordre en plus de la sanction disciplinaire. Mais c’est sans doute trop demander…

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